Intervention de Bernard Bel au colloque
Paye ton gynéco & cie : de la prise de conscience à l’action
Organisé par l’association Les Culottées, du Genre Humain
dans le cadre de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes
23 novembre 2019
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TRANSCRIPTION
DÉBUT
Merci à Sarah et à toutes les organisatrices du colloque “Paye ton gynéco & cie : de la prise de conscience à l’action” pour leur invitation !
Je vais donner un aperçu rapide de l’apparition du terme “Violences obstétricales” dans la littérature scientifique, telle que nous pouvons la retracer avec les outils documentaires de l’AFAR.
Depuis deux ans, on parle plus précisément de “Violences obstétricales ET GYNÉCOLOGIQUES” car les deux sont liées dans une problématique de violences SEXISTES.
QUI NOUS SOMMES
L’Alliance francophone pour l’accouchement respecté (AFAR)
Cela paraît très ambitieux, mais notre association compte actuellement seulement 27 membres :
• 25 femmes et 2 hommes
• dont 9 sages-femmes
• nos membres résident en France, au Québec, en Australie et en Suède
• deux co-présidentes : Alison Passieux et Barbara Strandman
NOTRE RAISON SOCIALE
Notre combat principal est celui pour la liberté de choix. C’est d’ailleurs aussi celui du CIANE qui a été fondé la même année.
Exercer un choix suppose d’avoir accès à une information complète et loyale.
NOS OUTILS
Des outils documentaires et de communication.
(Ma spécialité professionnelle : la documentation scientifique et l’archivage numérique.)
L’accès aux publications médicales est destiné autant aux usagers des services de maternité qu’aux professionnels de santé qui souhaitent améliorer leurs pratiques.
Nous avions aussi en projet des outils (wiki, réseau sémantique…) pour partager de l’information juridique. Mais ça n’a pas démarré par manque de continuité dans les engagements. Et aussi parce que les données juridiques sont particulières à chaque État alors que le scientifique est international.
EN FRANCE
La majeure partie de notre activité est intégrée à celle du CIANE. Ce Collectif s’est constitué en association, en 2006, afin de bénéficier de l’agrément du ministère de la santé pour la représentation d’usagers.
Pour travailler efficacement il faut croiser les expériences et les points de vue d’un maximum d’associations. Sinon chacune réinvente la poudre et on se satisfait de feux de paille qui ne changent rien sur le long terme.
Nous avons aussi déplacé vers le CIANE la gestion des recours face aux pratiques inacceptables en obstétrique et développé une plateforme informatique pour leur suivi.
Bien entendu, nous nous reconnaissons dans le combat de #NousToutes !
DANS D’AUTRES PAYS
Depuis la création de l’AFAR en 2004, nous sommes en lien avec les militantes québécoises du Regroupement Naissance Renaissance qui vient d’être rebaptisé “Regroupement Naissances Respectées”.
Avec les Espagnoles aussi, notamment dans leur combat sur l’épisiotomie.
Les barrages sont linguistiques : il est difficile de travailler à l’échelle strictement européenne, et il existe une demande grandissante en provenance de pays francophones d’Afrique.
CE QUI NOUS A CONDUIT À…
L’important est le lien entre la validité scientifique et la loyauté de l’information. C’est ce qui permet d’exercer un consentement ÉCLAIRÉ.
Les exemples correspondent à des actions que nous avons lancées et qui ont débouché sur des recommandations de pratique clinique.
Mais le combat n’est jamais terminé sur ces sujets. Notamment la pratique très nocive de l’expression abdominale qui persiste malgré le coup de semonce de la Haute Autorité de Santé en 2007…
EXPRESSION ABDOMINALE
Cette image qui date du 19e siècle est encore d’actualité alors qu’elle est supposée représenter l’obstétrique de “peuples primitifs” !
Ici on voit que c’est le père qui est chargé d’appuyer sur le ventre. J’ai entendu récemment le témoignage d’un père qui était tout fier qu’on lui ait confié ce rôle… C’est pratique car on ne peut plus accuser les soignants !
Il y a donc une hiérarchie d’exercice du pouvoir médical : médecin, sage-femme, conjoint, et la femme au bas de l’échelle.
APPARITION DE L’EXPRESSION V.O.
Au cours des années, plusieurs formes de dénonciation des violences obstétricales ont vu le jour. Déjà, en 1999, la canadienne Leilah McCracken avait publié son témoignage choc : “Rape of the 20th Century” qui associait les interventions obstétricales à des viols.
Marc Girard a étendu la protestation aux violences gynécologiques, de même que Martin Winckler à la même époque.
Puis des ouvrages plus récents ont actualisé le concept.
BASE DE DONNÉES BIBLIOGRAPHIQUES
Plus de 3000 fiches.
L’accès en est public et toute personne intéressée par la documentation peut y contribuer en tant qu’éditrice !
Voyons d’abord une requête sur le mot-clé “Violences obstétricales” qui renvoie à 147 fiches aujourd’hui…
NOS PLUS ANCIENNES RÉFÉRENCES
En fait on peut remonter à Sheila Stubbs qui en 1958 parlait de “Cruauté dans les maternités” dans le magazine “Ladies Home Journal”.
J’ai choisi de mettre en exergue le travail d’Hélène Vadeboncoeur, au Québec, qui a soutenu sa thèse sur ce sujet en 2004.
Vous voyez qu’en 2009 à la HAS on parlait plutôt de maltraitance “ordinaire” dans les établissements de santé, mais sans se limiter à l’obstétrique. Donc la dimension sexiste n’était pas mise en avant.
SUITE DES ANCIENNES RÉFÉRENCES
Remarquez l’apparition de “violencia obstétrica” comme violation des droits humains, au début des années 2010, en Amérique du Sud.
Et “obstetric violence” dans les pays anglophones, dont on dénonçait l’incidence sur le stress post-traumatique.
Enfin, le travail fondateur de Stéphanie St-Amant, docteure en sémiologie au Québec, membre de l’AFAR depuis le début, malheureusement décédée en 2017 à 42 ans.
UNE RÉCENTE PUBLICATION
Je montre ce détail pour illustrer ce qu’on trouve dans la base de données.
Elle est trilingue français/anglais/portugais.
Dans chaque langue nous rédigeons un “argument” qui résume en une phrase de quoi il s’agit.
COPIER LA NOTICE
Les boutons jaunes permettent de copier en un clic. Ici on a copié la notice qui peut être directement collée sur un blog ou un message FaceBook ou Twitter.
FICHE DÉTAILLÉE
On a le résumé dans la langue de l’article mais l’éditrice peut le traduire dans les autres langues avec l’aide d’un outil de traduction automatique. Pas besoin d’être documentaliste !
AFFICHAGE DES DOSSIERS
Certaines fiches peuvent être classées dans des dossiers selon un thème transversal. La même fiche peut apparaître dans plusieurs dossiers.
DOSSIER V.O. EN FRANCE
On a 24 fiches, voici les plus récentes : les rapports, communiqués de presse et articles publiés en France dans le débat sur les V.O.
On peut aussi connecter entre eux des articles, par exemple si l’un sert de complément, de commentaire ou de réponse à un autre.
On peut aussi attacher un fil de commentaires à chaque fiche.
TRAVAUX EN COURS
Un travail très documenté sur le stress post-traumatique consécutif à l’accouchement est en cours d’achèvement.
Le stress post-traumatique est un des effets les plus courants des violences obstétricales et gynécologiques, mais la plupart du temps ignoré ou mal diagnostiqué.
Cette observation est pleinement en phase avec les vécus des viols et agressions sexuelles.
TRAVAUX EN COURS — SUITE 1
Le consentement éclairé : cette notion existe dans le Code de la santé publique français, mais qui est très différemment interprétée par les usagères des services de maternité et par les soignants.
La centralité de cette question est apparue récemment dans une discussion au CIANE.
TRAVAUX EN COURS — SUITE 2
Nous avons donc créé un mot-clé “consentement éclairé” en le plaçant dans le cadre du “droit”.
TRAVAUX EN COURS — SUITE 3
Mais le vrai changement consisterait à passer de la notion de “consentement” à celle de “choix”, autrement dit de l’acceptation passive d’un acte à celui du choix exercé en toute autonomie. Même problème dans le mariage traditionnel où la femme devait “consentir à prendre pour époux…” ! Ou dans un acte sexuel qu’on catalogue comme “consenti”.
C’est ce changement de paradigme que proposent des sages-femmes québecoises. Catherine Gerbelli a précisé que ce choix éclairé devrait répondre à 5 questions :
Quels sont les “pour” de l’intervention en question, quels sont les “contre”, quelles sont les alternatives, qu’en dit la littérature scientifique et qu’est ce qui se fait dans la communauté ?
Je vous remercie de votre attention.