(date de cet article incertaine — Probablement 2003–2005)
Quelques informations pour le préparer
Le dialogue avec le monde médical est encore loin de se faire sans heurts ou confrontations. Il est malheureusement un passage trop souvent obligé pour que les parents et leurs bébés se fassent respecter tels des interlocuteurs à part entière. Le projet de naissance est donc difficile à faire appliquer dans certains lieux, mais ce n’est pas impossible.
Toutefois, le changement ne peut s’amorcer que si la discussion n’est plus sur le mode de la soumission qui est trop souvent de rigueur, mais sur le mode de l’information et de la prise de décision. Savoir que l’on a des droits et exiger leur application permet de répondre en partie à la question (récurrente) : “comment concrètement refuser une épisiotomie (ou tout autre acte médical) ?”
Il est évident que les “négociations” sont bien plus difficiles lorsque la grossesse est avancée, et que la femme, le couple, a envie de faire son nid plutôt que de batailler. C’est pour cela qu’il est important de travailler en amont.
Pour tels passages du projet de naissance, on vous dit non à cause du médico-légal ? Qu’à cela ne tienne, la réponse pourra être sur le même mode, textes du Code la santé publique à l’appui. Pour tel autre passage, on vous dira non à cause de votre santé ou de celle du bébé ; idem, les études médicales, les conseils de l’OMS, du rapport ministériel Bréart, la loi (voir ci-après) etc. appuieront favorablement vos demandes. L’AFAR peut également être un soutien en jouant un rôle de médiation avec l’équipe médicale et apporter aux parents les informations pour étayer leurs demandes. En dernier recours, un avocat affilié à l’association pourra également défendre les droits des parents.
Sophie Gamelin et Martine Herzog-Evans ont écrit (Les droits des mères, vol.1) qu’il “est de jurisprudence constante que la responsabilité du médecin ou de la sage-femme se fonde sur un contrat qui le lie au patient (Cass. Civ., 20 mai 1936, Mercier, D.P. 1936, I, 88, rapp. Josserand, concl. Matter, note E.P.).” Cet arrêt Mercier est fondamental car de nombreux professionnels ne savent pas qu’ils ont ce “contrat” tacite avec leur patient et donc refusent de signer ou donner leur aval à un projet de naissance. Pourtant signature ou pas, il y a bien CONTRAT, c’est ce qu’on appelle en matière de responsabilité civile le “contrat de soins” (cf. l’article 32 du Code de déontologie médicale).
La susceptibilité des médecins est moins importante que la santé et l’intégrité psychique et physique de la future mère ! L’anecdote suivante illustre parfaitement les réactions qui peuvent survenir lorsque la consultation ne repose plus sur l’autorité qui serait dévolue au praticien de santé. Vraiment outré qu’une femme enceinte refuse un toucher vaginal, un chef de clinique a rétorqué : “C’est moi le chef ici !”. Manifestement, il avait “oublié” que l’article L 1111–4 du CSP permet au patient d’opposer un refus devant tout acte médical. Concernant son corps, c’est bien au patient d’être le “chef” et seul décisionnaire. Il en va de même pour une épisiotomie et tout autre acte médical (rasage de la vulve, sonde, perfusion, etc.).
En pratique :
AVANT l’accouchement
- Une lettre de l’AFAR (prochainement en ligne), à inclure avec le projet de naissance, mettant noir sur blanc son soutien aux adhérents et parents, pourra apporter plus de poids. Un suivi téléphonique pourra être envisagé (avocat là encore si besoin), pouvant outre débloquer une difficulté de dialogue, permettre au couple enceint de “protéger sa bulle”.
- Les parents peuvent également se faire accompagner d’un “médiateur” d’une association locale. Vu le nombre d’associations qui font déjà du bon boulot (rencontres et discussions avec les professionnels au niveau local notamment), il devrait être possible de lancer ce projet. Comme il nous est logistiquement difficile de toucher directement TOUTES les associations « naissance » de France (même si une information est passée via la lettre-périnatalité), il est possible à tout parent de contacter l’association locale (voir le répertoire des associations sur le portail naissance ) pour leur demander de soutenir leur projet, et qu’un délégué vienne les soutenir physiquement. Nous vous remercions de nous tenir au courant afin de continuer à faire rebondir les informations.
- Répéter ses refus lors des visites à l’hôpital et les faire mentionner dans le dossier. Il n’est pas nécessaire de “partir en guerre”, mais avec une tranquille assurance, poser et faire respecter ses choix. Si le ton monte, ne pas chercher à convaincre, cela ne sert à rien, mais simplement (re)préciser ses choix et demandes. Jouer les “magnétophones” dans le style “Oui. Mais nous voulons…” peut être payant à la longue. Un conseil : toujours commencer ses phrases par un oui, cela montre que vous avez entendu votre interlocuteur, mais campez sur vos positions.
PENDANT l’accouchement
- Lors de l’accouchement et dans la mesure du possible, se faire accompagner par une personne extérieure (compagnon, doula, amie…) qui jouera la diplomatie entre professionnels et parents, et pour éviter d’avoir à se battre au moment M. Malheureusement, il arrive que des hôpitaux refusent qu’il y ait une personne en plus de la mère dans la salle de naissance. Dans le livre “Les droits des mères. La grossesse et l’accouchement” (Ed. L’Harmattan, 2003, p. 69) Sophie Gamelin-Lavois et Martine Herzog-Evans ont écrit : “Dans certains services, une seule personne est tolérée auprès de la parturiente, qui peut avoir à choisir entre son mari ou sa sage-femme, étant entendu que cette présence est tolérée par le service médical. A ce sujet, l’article D 712–80 du C.S.P. indique que : L’agencement de la salle tient compte de la présence éventuelle d’un accompagnant auprès de la parturiente lorsque cette présence est autorisée.”
- Faire plusieurs exemplaires du projet (dossier, équipe médicale..) et en apporter un le jour J
- Inscrivez au marqueur rouge les refus (pas d’épisiotomie par exemple)
- Si la personne qui est près de la mère voit le praticien prendre les ciseaux pour couper (épisiotomie) alors que la mère avait clairement exprimée son refus, elle peut arrêter son geste. Nous précisons cela car certains praticiens, même s’ils sont d’accord de prime abord, vont “oublier” ensuite, quand la femme est en position “poulet de Bresse” sur la table d’accouchement… En ce sens, arriver à dilatation de 8/9 à l’hôpital, c’est à dire consciemment au dernier moment, ne permettra pas d’éviter assurément certains gestes médicaux… Prudence et vigilance s’imposent. A ce sujet nous pouvons nous appuyer sur l’autonomie de la femme par rapport aux protocoles médicaux tels que confèrent l’art. 16–3 du code civil + (encore) l’article L 1111–4 du Code de santé publique (apprenez-le par coeur, il revient souvent celui-ci !!!). Voir page 71 du livre “Les droits des mères. La grossesse et l’accouchement” (Ed. L’Harmattan, 2003) : “Ce texte impose plus spécialement aux professionnels de « respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix ». Même lorsque « la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger », il est simplement prescrit au médecin de « tout mettre en ouvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables ». Il n’en demeure pas moins qu’aucun « acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. » Ce texte législatif trouve un relais dans le code de déontologie des médecins qui prescrit de respecter le consentement du malade.