Pour un accouchement respecté…
Le chemin de la naissance est à l’image du vécu des femmes et des hommes qui deviennent parents : multiple dans les choix qu’il implique, toujours perfectible au fil de l’expérience… Et pourtant, dans le monde moderne, il ressemble de plus en plus à une voie unique balisée par de nombreuses “prises en charge” qui déresponsabilisent les parents tributaires du savoir professionnel.
La naissance, en France, est devenue une marchandise dont le principal argument de vente est un discours sécuritaire, dénué de fondement scientifique, qui repose sur une confusion entre risque médical et risque médico-légal. Rien de surprenant à ce que les statistiques périnatales, dans un pays où se pratique la surenchère médicale, soient parmi les plus mauvaises d’Europe : la France est victime du syndrome de “malnaissance”…
Pour ce qui est de résoudre les nombreux problèmes posés par la venue prochaine d’un enfant, les parents en sont réduits à glaner des informations souvent peu fiables, obsolètes ou contradictoires, dans des magazines spécialisés dont la ligne éditoriale est en grande partie inféodée à leurs recettes publicitaires. Dès le début de la grossesse, ils subissent en guise d’information le discours infantilisant de nombreux “spécialistes” autoproclamés. Discours paternaliste dans lequel le compagnon et père-en-devenir est souvent relégué au second plan.
L’Alliance Francophone pour l’Accouchement Respecté (AFAR) réunit des parents, futurs parents et professionnels de la naissance ou de la petite enfance, aussi bien que des associations, qui souhaitent que la mère, le couple et l’enfant soient respectés dans leurs choix, quels qu’ils soient, au moment de la naissance qui peut être si décisif dans le commencement d’une existence. Elle se veut aussi une source exhaustive d’information, présentant les solutions possibles et leur réalisation concrète, afin de permettre à chacun de choisir en connaissance de cause. Sans être informé, comment faire un choix éclairé ? Nous sommes intimement persuadés de la nécessité de l’accès à l’information pour le plus grand nombre.
Nous sommes convaincus que le fait d’inciter les parents et futurs parents à s’interroger sur leur rôle et sur les conséquences de leurs choix en matière de naissance ne peut que les responsabiliser et les amener vers des formes d’éducation plus réfléchies. Nous estimons important que les parents puissent exprimer leurs besoins et attentes en ce qui concerne la naissance de leurs enfants, seule façon de faire sortir les professionnels de leur frilosité. Les parents et leur bébé doivent être mis au centre du système, sujets et non objets des soins ou de l’accompagnement. Un facteur clé s’élabore durant la grossesse et l’accouchement : la confiance. Confiance en la capacité de la mère à porter et à faire naître son enfant, confiance en la mission d’accompagnement du père, confiance vis-à-vis de l’enfant à naître, mais aussi confiance dans la collectivité humaine qui l’accueille… Pour cela, il est nécessaire que les parents soient encouragés à l’autonomie et non à la dépendance, à la responsabilité et non à la soumission. L’accès à l’information et la lecture d’expériences vécues par d’autres parents s’avèrent certainement plus efficaces que celle de conseils énoncés sur un ton péremptoire par des manuels de puériculture.
Pour l’AFAR, l’accouchement à domicile, de par sa capacité à respecter le rythme de la naissance et les besoins vitaux du bébé et de ses parents, devrait constituer la référence à partir de laquelle les structures, quelles qu’elles soient, mettent en place leurs protocoles. Il est trop méconnu que les pays limitrophes, favorisant l’accouchement à domicile ou en maison de naissance, arrivent en tête pour la qualité et la sécurité des naissances !
En prenant connaissance de l’information, les parents (enfin responsabilisés !) peuvent se réapproprier la naissance. L’objectif de l’AFAR est de soutenir les options de ses membres (parents, professionnels ; associations) en leur fournissant de l’information scientifique, des conseils sur les textes de lois, et un soutien juridique en cas de difficulté. Elle choisit également de profiter pleinement de son droit d’ester en justice pour la défense des usagers des services obstétricaux dont les droits n’ont pas été respectés (actes posés sans le consentement explicite des personnes concernées).
L’AFAR fait le choix de mettre en place dès mai 2004 la Semaine Mondiale de l’Accouchement Respecté, dont le cheval de bataille pour cette première édition sera l’épisiotomie, acte trop systématique alors que sa nécessité est plus que mise en cause — sa nocivité est même prouvée par de nombreux rapports scientifiques, connus des médecins mais non communiqués au grand public.
La situation de la naissance (hypermédicalisation, “usines à bébés”) est plus que préoccupante et nous comptons bien en faire prendre conscience, à la plus grande échelle possible. Nous sommes persuadés que le fait de tisser dans ce domaine un réseau associatif à l’échelle nationale, voire internationale, peut permettre à chacun d’améliorer le quotidien à son échelle, et à son tour contribuer à la responsabilisation d’autres personnes, instaurant ainsi une mentalité “citoyenne” jusque dans les choix à propos de naissance et d’éducation.